Save me || Ft. Siobhan

Le sang battait contre mes tempes dans un bruit sourd. Ça cognait dans ma poitrine. Ma respiration se faisait lente mais bruyante et j'avais l'impression de n'entendre qu'elle parmi tout le reste. Qu'est-ce qui m'avais pris d'aller au marché ce soir? Il y avait trop de bruit, à m'en rendre malade et trop de monde. Bien trop de monde. Tout un tas d'odeur m'envahissaient. J'avais faim, j'avais soif. Je savais que c'était juste pour ça que j'avais décidé de mettre le nez dehors. Mais pourquoi traverser un tel endroit? Je voulais me faire du mal tout seul? La gorge sèche, les yeux brillants, j'étais déjà en quête de quelqu'un qui pourrait faire l'affaire. Retiens toi, ne cède pas tout de suite si facile à dire... Si compliqué à faire... Je me répétais ces mots inlassablement, tandis que j'approchais de ma victime. Je ne la tuerai pas. Je me l'ordonnais. Je me l'imposais. Je faisais de mon mieux pour ne pas le faire. Une fois attrapée, elle se débattait. Comme toute. Pourquoi lutter? Pourquoi chercher à me rendre la tâche plus compliquée? Parfois ça m'exaspérait. Mais je m'exaspérais davantage. Finalement j'eus enfin droit à son sang, au milieu d'une impasse loin du tumulte du marché. Ne la tue pas, ne la tue pas.. Non je ne la tuerai pas... Ceci dit... N'étais-je pas en train de la laisser là pour morte? Ce pauvre être humain qui n'avait rien demandé... Je me redressais, essuyant mes lèvres rougies. Son pouls était faible. Mais ma proie était vivante encore. Très vite je l'abandonnais là. Si je traînais trop, qui sait qui me tombera dessus.

Je me retrouvais de nouveau dans la foule des gens sur le marché. Ma soif s'était calmée. Mais pour combien de temps? Le tumulte me rendait fou. Je n'en pouvais plus. J'avais envie d'en sortir. Je traversais le marché, cherchant la sortie, lorsque je sentis une présence derrière moi. Je détestais cette sensation. Je sentais que l'on me fixais. Me faufilant parmi la foule, je me rendis compte que l'on me suivait. Depuis combien de temps? C'était mauvais signe. Qui me suivais? J'entrepris alors de marcher un peu plus vite, passant à travers la foule, me faufilant dans les allées, et puis je finis par me glisser dans un passage, attendant que mon suiveur passe. Une rouquine se détacha du lot et avait un comportement qui me parut trop louche. Et attendant le bon moment, je finit par la saisir et la plaqua au sol, mes mains sur ses épaules:
- T'es qui? Qu'est-ce que tu me veux? Pourquoi tu me suis?
J'étais fébrile, mon emprise se faisant plus grande sur ses épaules. Et si c'était une rebelle? Mais déjà son odeur particulière me gênait. Elle n'était pas vampire, au moins maintenant je le savais. Et elle n'était pas non plus une humaine comme les autres. Je le sentais. J'en devenais plus méfiant.

Je retenais la rouquine au sol, les nerfs et les sens à fleur de peau. Et si elle m'avait vue? Et si c'était une rebelle qui avait prévu de m'éliminer? Je n'osais même pas imaginer cette éventualité. Mourir. Non, en soit ça me faisait encore plus peur maintenant que j'étais devenu un vampire, contre mon gré... Mon emprise se faisait assez forte sur l'humaine, la maintenant au sol. J'étais sur la défensive et sur mes gardes. Elle dégageait un parfum pas comme les autres. Elle n'était pas comme les autres. Et c'était qui surtout? Cela faisait trop de questions à la fois...

J'avais légèrement tressailli dès les premiers mots qu'elle prononça. Une amie de ma mère?... Rien que l'évocation de ma mère avait produit un choc chez moi. Pas là pour m'attaquer? Ma mère qui lui a demandé de me retrouver?... J'étais encore plus perdu. Elle me cherche parce que ma mère le lui a demandé? Ma mère est morte.... Depuis quand alors me suit-elle ainsi? Elle me demanda de la lâcher. Elle ferait mieux de me laisser. Ou de cesser de me chercher. Elle est morte... Et elle arrive trop tard... Je lâchait prise, complètement dépassé par les évènements, les bruits et les odeurs n'arrangeant rien la chose.
- Depuis quand tu me cours après ?.... Ça va faire bientôt un an qu'elle est morte.

Je craignais surtout le pire. La rouquine était une rebelle. J'en étais presque sûr. Parce que ma mère avait fait partie des rebelles. J'avais pris mes distances. Mon oncle rirait en me voyant. Moi un vampire, reculer devant un humain. S'il savait aussi combien c'est compliqué à mes yeux. Je me sens encore malade de me sentir différent et à devoir tuer ou presque des gens qui étaient avant des semblables... Et face à une rebelle... C'était pire. J'analysais tout. Était-elle armée? Mon regard était focalisé sur elle et les moindres gestes ou expression qu'elle faisait.

- ... T'es une rebelle n'est-ce pas?... C'est que comme ça que t'as pu connaître ma mère... Juste pour que ça confirme ce que je ressens. Va-t-elle oui ou non me liquider? C'était comme si la question en elle-même, je tentais de la lui poser, plongeant mon regard dans le sien. De toute façon, c'est simple, au moindre geste louche, je réplique...
- ... Et si elle n'a pas pu te dire quoi que ce soit sur... moi, c'est parce qu'elle est morte avant... ajoutais-je peu après. Je n'avais pas pu dire vampire, ni faire de phrase avec, comme si les murs, qui nous entouraient, pouvaient avoir des yeux et des oreilles...

Que faire? Elle me suivait peut être mais je comprenais surtout qu'elle me cherchait. Depuis quand ? Longtemps peut être... Je ne lui reprochais pas de pas s'être montrée à temps. Après tout. Celui qui n'avait pas montré le bout de son nez aussi c'était moi. A cause de mon oncle et de ma transformation, mais ça ne changeait rien. Enfin si. Peut être que si j'avais pu me pointer devant elle avant, elle aurait pu me sauver.

Mais maintenant? Il était sans doute trop tard pour ça. A moins de me tuer, elle ne me sauvera pas. Et savoir qu'elle a connu ma mère réveillait des souvenirs que j'avais tenté de garder cachés. Je n'avais pas répondu à sa remarque quant au fait qu'elle n'était pas la chasseuse mais normalement la victime. Il fallait être aveugle ou ne pas avoir un bon odorat pour ne pas le deviner. Elle n'était pas une humaine comme les autres.

J'aurais pu pleurer à l'entendre dire que ma mère avait demandé à cette femme de me soutenir, et donc de me trouver, que ma mère s'était fait du soucis pour moi. A défaut de pouvoir pleurer, j'avais seulement détourné le regard. Ce qui déjà me rassura était qu'elle insista sur le fait qu'elle ne voulait pas me tuer. Changer de rue? Je voulais moi aussi partir du marché, ma tête allant exploser si je restais là. En plus j'avait sentit que des étrangers étaient en train de se rapprocher. Mais j'avais trop de choses à demander à la demoiselle pour les laisser me déranger dans cette conversation.

Aussi, je fis signe à la demoiselle de me suivre. Je marchais assez vite, mais pas trop de façon à ce qu'on ne se perde pas elle et moi en cours de route. Traversant le marché, je finis par en trouver la sortie, et me rendis avec la rebelle à un endroit plus calme, sur le toit d'un immeuble. Là, je m'assis par terre, appréciant enfin le calme. Je pris le temps de me détendre un peu aussi avant de me remettre à parler.

- Désolé de t'avoir sauté dessus tout à l'heure... Je n'étais pas bien non plus là bas. J'espérais surtout que je ne l'avais pas blessée quelque part, aussi je la regardais un peu, comme pour m'en assurer. Elle était grande. Encore plus maintenant que j'étais assis.

- Je ne savais pas qu'elle avait demandé à des amis de me retrouver. Puis elle est partie si vite... Je ne me sentais ni bien ni mal. Juste profondément triste. J'avais la gorge serrée. Mais ce corps mort mais pourtant vivant me déroutait à ne pas avoir les réactions que j'espérais. Désolé d'avoir été une perte de temps. Tu devais bien avoir d'autre trucs à faire que de t'occuper à retrouver quelqu'un.

Assis sur le toi, je me sentais enfin calme. Je la vis s'assoir assez à l'écart. Je comprenais, même si quelque part au fond de moi je savais que j'avais tout sauf envie de l'attaquer et que je n'aimais pas savoir que j'étais encore quelqu'un de dangereux. Savoir que je ne lui avais pas fait trop mal, me soulageais tout de même un peu. Ceci dit, je le vivais mal. Je ne me supportait pas vraiment. Ce n'était pas facile non plus. Passer ainsi de humain à vampire... Si on m'avait donné le choix, peut-être aurais-je vu les choses différemment. Mais on m'avais retiré la vie de simple mortel pour me transformer en ce que je n'aimais plus vraiment,. Les toits étaient souvent les seuls endroits où je pouvais vraiment me sentir au calme. Il y avait bien d'autres endroits, mais être en hauteur me plaisait toujours plus que les autres.

J'avais encore le coeur lourd de savoir que la rouquine avait pu connaître ma mère. Je me demandais du coup si elle savait pour sa mort. Ou si elle n'était juste pas du tout au courant. Après un petit instant de silence, elle s'intéressa à ma transformation.
- Il y a un an... Peu après la mort de ma mère. Mon oncle m'a retrouvé et ne m'a pas donné le choix. Il m'a attaqué et m'a transformé... par vengeance. J'hochais de la tête un petit sourire aux lèvres, lorsqu'elle parla d'être ici, sur le toit d'un immeuble.
- J'aime bien être sur les toits. C'est... loin des tentations. Et on y est généralement assez tranquilles. Même si j'étais actuellement en compagnie d'une rebelle, et donc d'une humaine, j'avais la sensation de ne plus penser à ce qui d'habitude me prenait bien souvent la tête, sans doute parce que j'étais loin du tumulte et loin des odeurs trop envahissantes.

La question de la rebelle me troubla. M'aider? A part me tuer, il ne restait plus grand chose à faire si? J'en sais rien. J'eus un léger rire, regardant aussi le vide.
- Si tu as quelque chose pour me rendre humain de nouveau alors je suis preneur ! ironisais-je, avant de lâcher un soupir. Sérieusement, je ne sais pas... Et je doute que tu sois bien placée pour m'aider à me contrôler... Ceci étant, si tu penses avoir de quoi m'aider, alors je suis preneur. Je n'étais jamais contre une aide extérieure, parce que j'étais vraiment livré à moi-même face à tout ça, mon oncle jugeant peu nécessaire de m'aider entièrement.

Et puis l'envie d'en savoir plus sur elle et sa relation avec ma mère me prit.
- ... Quelle relation t'avais avec ma mère ? Pour qu'elle te demande des choses comme prendre soin de moi ou me retrouver, vous deviez être assez proches... non? peut être étais-je trop curieux... Je n'en sais trop rien.